samedi 10 septembre 2011

Mise au point sur la formalité de déclaration de souscription et de versement dans la société anonyme. Appréciation de la note commune n°3/2005 (texte n°DGI 2005/10)


L’administration fiscale a pris une note commune n°3/2005 (texte n°DGI 2005/10) destinée à l’interprétation de l’article 24 du code des droits de l’enregistrement et de timbre soumettant à un droit de 100 dinars la formalité de la déclaration et de souscription prévue à l’article 170 du code des sociétés commerciales. Un passage de cette note commune retient l’attention. Il est en effet écrit que « la constitution des sociétés de capitaux qui sont les sociétés anonymes et les sociétés en commandite par actions se fait par étapes. Cette constitution nécessite la présentation de plusieurs documents et le respect de certaines procédures. Le receveur joue un rôle important dans cette constitution qui consiste d’abord à vérifier la souscription et la libération des actions, le dépôt des fonds et la liste des souscripteurs dans le cadre de l’établissement de la déclaration de souscription et de versement conformément aux dispositions du code des sociétés commerciales et notamment l’article 170. Dans ce cadre, le receveur des finances perçoit en faveur du trésor le droit de souscription et de versement prévu par l’article 24 du code des droits de l’enregistrement et de timbre ». La note commune ajoute que « ce droit est perçu à l’occasion de la constitution des sociétés ou de l’augmentation de leur capital.. ».
Dans la pratique, notamment au Guichet unique de l’Agence de promotion de l’industrie, les investisseurs ne peuvent effectuer les formalités de constitution d’une société anonyme ou d’augmentation de son capital que s’ils accomplissent la formalité de déclaration de souscription et de versement. Le Conseil du marché financier, la Bourse de valeurs mobilières de Tunis et la Conservation de la propriété foncière, chacun en ce qui le concerne, exigent toujours la production de la déclaration de souscription et de versement, considérée comme condition de forme nécessaire à la validité de la constitution de la société ou de l’augmentation de son capital. Toutes ces prises de position officielles influencent la pratique du droit de la société anonyme. Les praticiens, par résignation ou par simple ignorance du droit positif, continuent à accomplir la formalité sans trop se soucier de son exigence juridique. La présente note se veut donc une mise au point sur la teneur du droit positif qui a évolué par rapport à ce qu’il était sous l’empire du code de commerce.
Sous l’empire du code de commerce et en s’inspirant du droit français[1], la constitution[2] de toute société anonyme, avec des apports en espèces, ou l’augmentation du capital par des apports en numéraire[3] donne lieu à l’établissement par les fondateurs ou par les dirigeants sociaux, selon le cas, d’une déclaration de souscription et de versement reçue par le receveur de l’enregistrement. La déclaration de souscription et de versement est déposée au greffe du tribunal[4]. Les dispositions du code de commerce sont explicites et nulle personne ne doute du caractère obligatoire de cette formalité[5], qu’il s’agisse d’ailleurs d’une société faisant appel public à l’épargne ou non.
Il semble à la lecture de la note commune précitée que certaines réformes introduites par le code des sociétés commerciales en matière de constitution des sociétés anonymes et d’augmentation de leur capital n’ont pas été appréciées à leur juste mesure ou du moins que les nuances de la nouvelle législation n’ont pas été suffisamment mises en relief. En effet, telle que rédigée, la note commune laisse entendre que les anciennes règles du code de commerce n’ont pas été modifiées et que la déclaration de souscription et de versement a un domaine large, qu’elle est exigée tout aussi bien pour la société anonyme faisant appel public à l’épargne que pour la société ne faisant pas appel public à l’épargne et qu’elle s’applique à la constitution de la société ou à l’augmentation de son capital.
En réalité, le code des sociétés commerciales a apporté une modification substantielle au droit positif. S’agissant de la constitution d’une société anonyme, la formalité de déclaration et de souscription est exigée pour la seule société faisant appel public à l’épargne (I). En revanche, lors de l’augmentation de capital, la formalité est remplacée par le certificat de souscription et de versement établi par le banquier dépositaire des fonds. Peu importe alors la nature de la société ayant augmenté son capital (II).

I)                   Le domaine de la formalité de déclaration de souscription et de versement lors de la constitution d’une société anonyme
La formalité de déclaration et de souscription est exigée pour la seule société faisant appel public à l’épargne (A). Pour la société anonyme ne faisant pas appel public à l’épargne, le fondateur se limite à présenter aux actionnaires, lors de l’assemblée générale constitutive, une simple déclaration mentionnant les versements de la part exigible des actions (B).

A) La formalité de déclaration de souscription et de versement lors de la
constitution d’une société anonyme faisant appel public à l’épargne
L’article 170 C.S.C. figure dans un chapitre consacré à la constitution de la société anonyme faisant appel public à l’épargne. Il dispose que les souscriptions et les versements sont constatés par une déclaration des fondateurs reçue par le receveur de l’enregistrement du siège social. La même formalité est inutilement reprise par l’article 176 C.S.C.
Le fondateur annexe à la déclaration de souscription et de versement un certificat du dépositaire des fonds constatant les versements effectués, la liste des souscripteurs indiquant l’état des versements effectués par chacun d’eux et un original du projet des statuts. Le receveur restitue au déclarant les bulletins de souscription après les avoir visés. La loi n°2005-65 du 27 juillet 2005, modifiant et complétant le code des sociétés commerciales a allégé la formalité de représentation des bulletins de souscription lorsque les souscriptions sont reçues par des intermédiaires en bourse ou des banques. Enfin selon l’article 176 C.S.C., le receveur de l’enregistrement est habilité à délivrer au déclarant des copies certifiées conformes de ladite déclaration de souscription et de versement.
Le non accomplissement de la déclaration de souscription et de versement peut être sanctionné par la nullité de la société en application de l’article 179 C.S.C. Mais un jugement est nécessaire. L’action en nullité se prescrit par un délai de trois ans[6].
Par ailleurs, l’article 186 C.S.C punit d’une peine d’emprisonnement d’un à cinq ans et d’une amende de 1.000 à 10.000 dinars ceux qui, dans la déclaration visée à l’article 170 C.S.C., ont affirmé véritable les souscriptions qu’ils savaient fictives ou ont déclaré de mauvaise foi que les fonds ont été effectivement versés alors qu’ils n’ont pas été mis à la disposition de la société.

B) L’exclusion de la formalité de déclaration de souscription et de versement lors de la constitution d’une société anonyme ne faisant pas appel public à l’épargne
En matière de constitution d’une société anonyme ne faisant pas appel public à l’épargne, le législateur légifère par renvoi aux dispositions applicables aux sociétés anonymes faisant appel public à l’épargne.
L’article 180 (ancien) C. S .C. énonce que « lorsqu’il n’est pas fait publiquement appel à l’épargne, les dispositions du chapitre I du livre quatre ci-dessus sont applicables à l’exception des articles 163, 171, 173 et 175 du présent code ».
Le législateur procède dans cet article par renvoi aux dispositions régissant les sociétés faisant appel public à l’épargne en écartant les dispositions relatives :
- à l’établissement d’un projet des statuts et à son dépôt au greffe du tribunal[7] ;
- à la convocation et à la tenue d’une assemblée générale constitutive[8] ;
- en cas d’apport en nature, à la désignation d’un commissaire aux apports par ordonnance sur requête[9].
La mauvaise rédaction de ce texte a donné lieu, en pratique, à des errements. C’est ainsi que les fondateurs de société anonyme ne faisant pas appel public à l’épargne se sont trouvés obliger de faire publier une notice dans la mesure où le législateur n’exclut pas expressément l’application des dispositions des alinéas 3, 4, et 5 de l’article 164 C.S.C[10]. Heureusement que la loi n°2005-65 du 27 juillet 2005, modifiant et complétant le code des sociétés commerciales est venue remédier à cette erreur de rédaction.
De même, la rédaction de l’article 180 C.S.C. a laissé en suspens la question de la formalité de déclaration de souscription et de versement. En pratique et plus spécialement au niveau du Guichet unique, on a continué à l’exiger au motif que l’article 180 C.S.C. n’exclut pas expressément l’application des articles 170 et 176 C.S.C. régissant la déclaration de souscription et de versement. Cette interprétation est contredite par la règle consacrée par l’alinéa 3 de l’article 181 du code des sociétés commerciale. Ce texte précise que les fondateurs doivent mettre à la disposition des actionnaires «une déclaration mentionnant le versement de la part exigible des actions ». En quelque sorte, ce sont les actionnaires qui reçoivent la déclaration du fondateur sur les versements effectués et non le receveur de l’enregistrement. La déclaration du fondateur relativement à la souscription du capital est superflue puisque tous les actionnaires ont en eu connaissance lors de leur intervention dans l’acte constitutif de la société. Par cette disposition de l’alinéa 3 de l’article 181 C. S .C., le législateur a entendu exclure l’application de l’article 170 C.S.C. relatif à la déclaration de souscription et des versements. Il y a entre les deux textes deux différences sémantiques significatives qui éclairent sur la volonté du législateur[11].
Enfin, on peut voir dans l’article 182 (alinéa 2 nouveau) C.S.C. une preuve supplémentaire de la non-exigence de la déclaration de souscription et de versement lors de la constitution de la société anonyme ne faisant pas appel public à l’épargne. En effet, cet article prévoit les causes de nullité de la société anonyme ne faisant appel public à l’épargne. Il cite seulement la violation des dispositions de l’article 160, de l’alinéa 2 de l’article 164, des articles 165 et 166, de l’article 167 à l’exception des numéros (5) et (7), et de l’article 168 C.S.C. Nulle mention n’est donc faite de la violation des articles 170 et 176 C.S.C. Or même si l’on estime que la déclaration de souscription et de versement est obligatoire sa sanction par la nullité n’est pas possible en vertu de l’article 182 (alinéa 2 nouveau). Il vaut mieux alors reconnaître que le législateur a supprimé purement et simplement cette formalité dans le but d’alléger le formalisme de constitution de la société anonyme ne faisant pas appel public à l’épargne qui se rapproche désormais de celui d’une société à responsabilité limitée[12].
Notons enfin qu’au plan pénal, les fondateurs d’une société anonyme ne faisant pas appel public à l’épargne ne peuvent pas, en l’absence d’un texte exprès, être poursuivis pour leur fausse déclaration aux actionnaires sur le versement de la part exigible des actions.

II)                Le certificat de souscription et de versement établi par le dépositaire des fonds lors de l’augmentation de capital de toute société anonyme
Après avoir exposé la teneur du droit positif (A), il sera démontré en quoi certains arguments invoqués par ceux qui soutiennent le caractère obligatoire de la formalité de la déclaration de souscription et des versements sont erronés (B).

A) La consécration d’un régime unifié, moins formaliste et plus efficace pour la constatation de la réalisation de l’augmentation de capital d’une société anonyme
Les articles 292 à 306 du code des sociétés commerciales consacrés à l’augmentation de capital d’une société anonyme ne prévoient pas d’une manière spécifique la formalité de déclaration de souscription et de versement. Il n’existe même pas un renvoi aux articles 170 et 176 C.S.C. Contrairement au code de commerce, aucun parallélisme des formes n’est donc établi en la matière entre la constitution et l’augmentation de capital d’une société faisant appel public à l’épargne[13].
Il faut dire que le législateur a entendu innover en la matière et soumettre l’augmentation de capital de toute société anonyme à un régime unifié, moins formaliste et plus efficace. L’article 304 C. S. C. dispose que «les souscriptions et les versements effectués aux fins de la participation lors de l’augmentation de capital social sont constatés par un certificat délivré par l’établissement auprès duquel les versements sont effectués, sur présentation des bulletins de souscription ». Comme son nom l’indique, le certificat constate à la fois les souscriptions et les versements. Le texte arabe est éloquent[14]. La formule nous rappelle la formalité faite devant le receveur de l’enregistrement qui lui aussi, selon l’article 170 C.S.C., constate les souscriptions et les versements. Le certificat établi par le dépositaire des fonds lors d’une augmentation de capital est ainsi différent de celui qu’il établit lors de la constitution de la société anonyme faisant appel public à l’épargne[15]. Le certificat est établi par le dépositaire des fonds à la lumière des bulletins de souscription qui lui sont présentés. Le banquier dépositaire est ainsi investi de la même confiance jadis placée dans le receveur de l’enregistrement ; il est à même d’effectuer les vérifications d’usage pour constater les souscriptions et les versements[16].
La nouvelle mesure introduite par le code des sociétés commerciales est inspirée du droit français[17]. Elle est destinée à alléger les formalités d’augmentation de capital et d’accélérer la mise à disposition des fonds à la société. En effet, sous l’empire du code de commerce, le retrait des fonds ne peut être opéré que sur la signature du conseil d’administration ou de son mandataire, dix jours au moins après la déclaration et de versement[18].
L’article 305 C.S.C. confirme la suppression de la déclaration de souscription et de versement puisque contrairement à ce qui prévalait sous l’empire du code de commerce, la preuve de la libération des actions de numéraire par compensation de créances certaines, liquides et exigibles sur la société est établi par un certificat délivré par le conseil d’administration et approuvé par le commissaire aux comptes. Le receveur de l’enregistrement n’intervient plus.
Le certificat de souscription et de versement établi par le dépositaire des fonds est d’application obligatoire. La violation de cette formalité est sanctionnée. L’article 313 C.S.C. punit en effet d’une amende de 120 à 1.000 dinars les organes de gestion qui auront manqué à l’établissement du certificat. L’approbation intentionnelle de fausses informations ou l’usage du faux sont également sanctionnés. Toutes les précautions ont été donc prises pour protéger les actionnaires et les tiers contre les dirigeants ou dépositaires de fonds indélicats.

B) Critique d’un formalisme révolu
Tous ceux qui soutiennent le caractère obligatoire de la formalité de déclaration de souscription et de versement lors de l’augmentation du capital d’une société anonyme invoquent à l’appui de leur thèse la pratique suivie jusque-là par le seul Guichet unique (a) elle-même assise sur un principe implicite de parallélisme des formes (b). Ils invoquent également une représentation particulière de la teneur de l’article 303 du code des sociétés commerciales (c). L’ensemble de ces arguments est insuffisant à remettre en cause la validité des conclusions précédentes.

a) Une pratique non uniforme
Il faut reconnaître que la pratique du Guichet unique est loin d’être partagée par tous les greffes des tribunaux. En effet, les greffes des tribunaux de Tunis ou de l’Ariana, que l’on cite en connaissance de cause, se limitent à l’application des textes tels que nous les avons compris.
A la vérité, la valeur d’une pratique ne vaut que par la qualité des arguments sur lesquels elle se base. C’est aussi valable pour la pratique des greffes des tribunaux de Tunis et de l’Ariana que pour la pratique du Guichet unique. C’est ce qui justifie que l’on examine d’une manière approfondie la valeur de l’argument tiré du principe du parallélisme des formes et celui tiré de l’article 303 C.S.C.

b) Parallélisme des formes - Equivalence des formes
En réalité, la thèse soutenue au niveau du Guichet unique est assise sur un argument implicite de parallélisme des formes. Comme le législateur a requis l’accomplissement d’une déclaration de souscription et de versement lors de la constitution de la société, il faut conclure à son exigence lors d’une augmentation de capital. L’augmentation de capital réalisée sous la forme soit de nouvelles souscriptions en espèces, soit de nouveaux apports en nature serait dans ce sens une « constitution partielle ». Il y a là, à notre sens, une mauvaise appréciation du statut du formalisme en droit et du rôle du principe du parallélisme des formes dans l’interprétation juridique.
Les formes qu’institue le droit positif pour la validité des actes juridiques sont toujours énoncées par la loi d’une manière expresse. Elles n’ont jamais une existence en dehors de la loi. Il en découle, en principe, que le juge ne peut imposer une forme juridique à un acte en cas de silence de la loi. On dira que les formes sont d’interprétation stricte[19].
On entend souvent parler du principe du parallélisme des formes comme s’il a la vertu de combler les lacunes de la loi. Cette démarche est, à notre avis, erronée et trahit le régime juridique du formalisme tel qu’exposé plus haut. En réalité, le principe du parallélisme des formes a plutôt une valeur descriptive du droit positif. Il tend à démonter que le législateur exige, par souci d’équilibre, de suivre les mêmes formes pour des opérations semblables ou proches. C’est le législateur qui l’exige et non le juge par un effort d’interprétation pour combler une prétendue lacune de la loi. Mais le législateur est souverain et peut avoir des rasions pour supprimer, atténuer ou substituer un formalisme par un autre. C’est cette dernière solution qui a été suivie en la matière dans l’article 304 C.S.C. La déclaration de souscription et de versement reçue par le receveur de l’enregistrement lors de la constitution d’une société anonyme est remplacée par le certificat de souscription et de versement établi par le dépositaire des fonds lors de l’augmentation de capital. Il n’y a pas à proprement parler une atteinte, une suppression du parallélisme des formes mais, plutôt, une adaptation. Nous sommes dans une hypothèse où le certificat du dépositaire des fonds est formellement différent de la déclaration de souscription et de versement devant le receveur de l’enregistrement, mais où le principe du parallélisme des formes est pourtant respecté car la finalité de la forme l’est aussi. Une forme matériellement différente de celle appliquée lors de la constitution de la société est admise parce qu’elle est fonctionnellement équivalente. L’équivalence est en effet indissociable de la finalité de la règle : si la protection poursuivie par la règle de forme est atteinte par d’autres moyens, on peut parler d’équivalence des formes[20].

c) Le renvoi par l’article 303 C.S.C aux articles 167, 169, 178 et suivants
Certains ont cru pouvoir asseoir la déclaration de souscription et de versement sur l’article 303 C.S.C. Le recours à cet article est apparemment justifié par la cascade de renvoi d’un texte à un autre. Il est, en effet, prévu que « le contrat de souscription est constaté par un bulletin de souscription établi dans les conditions déterminées par les
articles 167, 169, 178 et suivants du code des sociétés commerciales ». L’expression «et suivants » permet de viser l’article 179 C.S.C. selon lequel «est nulle et de nul effet toute société anonyme constituée en violation des dispositions des articles 160 à 178 du code des sociétés commerciales ». Ainsi, l’article 303 C.S.C. apparaît comme une poupée russe. En référant à l’article 179 C.S.C., il renvoie indirectement aux articles 170 et 176 C.S.C. relatifs à la déclaration de souscription et de versement.
Cette lecture de l’article 303 C.S.C est, à notre avis, artificielle[21] et surtout erronée car la disposition traite seulement du contrat de souscription[22] (et des ses suites), c’est-à-dire de la relation qui peut s’établir entre un souscripteur et la société à l’occasion d’une augmentation de capital. Ainsi, le souscripteur exprime son intention de faire apport à la société dans un bulletin de souscription dont les mentions obligatoires sont prévues l’article 167 C.S.C. Si l’augmentation de capital n’est pas achevée dans les délais impartis, le souscripteur pourra, en application de l’article 169 C.S.C., demander la restitution des fonds ; il pourra également engager la responsabilité des dirigeants sociaux en application de l’article 178 C.S.C. S’il veut agir en nullité de l’augmentation de capital, en raison des vices affectant le contrat de souscription, son action sera régie par l’article 179 C.S.C. En d’autre terme, le renvoi fait par l’article 303 C.S.C. aux articles 167, 169, 178 et 179 du code des sociétés commerciales doit être limité aux seuls besoins de la détermination du régime juridique du contrat de souscription23[23]. L’article 303 C.S.C. ne préjuge en rien les formalités à suivre pour constater la réalisation de la souscription de l’augmentation du capital qui sont plutôt régies par les articles 304 et 305 suivants.

Conclusion
Il résulte des développements qui précédent que la formalité de la déclaration de souscription et de versement est requise lors de la constitution d’une société anonyme faisant appel public à l’épargne et qu’elle n’est pas requise lors d’une opération d’augmentation de capital. Les dispositions du code des droits de l’enregistrement et de timbre n’infirment nullement cette analyse, bien au contraire elles ne font que la confirmer.
En effet, le code des droits d’enregistrement et de timbre n’a pas pour but de fixer une formalité juridique en droit des sociétés. Son rôle est plutôt de fixer un tarif à une formalité requise par le droit des sociétés. Donc, l’obligation de droit de fiscal est la conséquence d’une obligation du droit des sociétés. Le code des droits de l’enregistrement et de timbre confirme la lecture précédente du code des sociétés commerciales. L’article 24 tout en se référant à l’article 170 C.S.C., exclusivement, soumet la formalité à un droit fixe de 100 dinars. Le législateur fiscal prend donc soin de ne pas contrarier les dispositions du code des sociétés commerciales qui cantonnent la formalité à un domaine d’application spécifique.



[1] Le droit français consacrait un régime proche de celui qui était en vigueur sous l’empire du code de commerce. « Les fondateurs devaient faire une déclaration notariée de souscription et de versement. Dans l’acte qu’il dresse, le notaire affirme que le montant des versements déclarés par les fondateurs correspond à celui des sommes déposées dans son étude ou figurant au certificat du dépositaire. La déclaration notariée fait foi jusqu’à inscription de faux de la matérialité des déclarations faites par les fondateurs et de leur conformité avec les pièces justificatives, mais pas de leur sincérité ou de leur exactitudes ». J. Hamel, G. Lagarde, A. Jauffret, droit commercial, sociétés, groupements d’intérêt économique, entreprises publiques, T. 1, 2 Vol., p. 330, Dalloz, 1980. 2 éd. Pour l’évolution du droit français, voir note 17 infra.
[2] Art 54 CC
[3] Art. 105 CC. Est assimilé à l’apport en espèces l’apport à réaliser par compensation de créances (art. 105 CC).
[4] Art. 177 n°1 CC. Paradoxalement, la loi du 2 mai1995, relative au registre de commerce n’exige pas le dépôt d’une expédition de la déclaration de souscription et de versement au greffe du tribunal. (Voir art. 45). Cette « lacune » s’explique par le fait que les auteurs de cette loi se sont inspirés du droit français qui a évolué entre temps en supprimant la déclaration notariée de souscription et de versement (V. note 17 infra). Ainsi, on a omis d’adapter la loi du 2 mai 1995 au droit tunisien des sociétés commerciales tel qu’il est véhiculé par le Code de commerce.
[5] Le non respect de la formalité entraîne la nullité de la constitution de la société (art. 62 CC.) ou de l’augmentation de capital (art. 119 C.C.). Il est également prévu une sanction pénale pour les fausses déclarations (art. 69-1 C.C.).
[6] Art. 179 C.S.C. En pratique, le greffier chargé d’effectuer un contrôle de régularité formelle lors de l’immatriculation des sociétés commerciales au registre du commerce exige le dépôt de la déclaration de souscription et de versement. En effet selon l’art. 29 de la loi n°95-44 du 2 mai 1995, relative au registre du commerce, le greffier, s'assure de la régularité de la demande, il vérifie que les énonciations sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires, correspondent aux pièces justificatives et actes déposés en annexe et sont compatibles, dans le cas d'une demande de modification ou de radiation, avec l'état du dossier.
[7] Art. 163 C.S.C. Cette exclusion de l’article 163 C.S.C. est justifiée par l’alinéa 1er de l’article 181 C.S.C. qui dispose que « les statuts sont signés par les actionnaires ». Il n’y a plus d’obligation d’établir un projet des statuts ; les statuts sont définitivement adoptés par les actionnaires. Certes, il peut y avoir un avant-projet des statuts ou plus exactement un contrat de promesse de fondation d’une société anonyme, mais un tel contrat n’est pas pertinent pour l’application du code des sociétés commerciales
[8] Art. 171 et 175 C.S.C.
[9] L’alinéa 2 de l’article 181 C.S.C. prévoit que les statuts doivent contenir une évaluation des apports en nature sur la foi d’un rapport d’expertise porté en annexe. La règle signifie que le commissaire aux apports n’est plus désigné par le juge, à la requête des fondateurs, mais directement par les actionnaires qui doivent respecter les règles régissant les incompatibilités non expressément exclues par l’article 180 C.S.C. L’adoption de la valeur de l’apport en nature est, par ailleurs, décidée à l’unanimité au moment même de l’établissement des statuts. Le rapport du commissaire aux apports est annexé aux statuts. La loi n°2005-65 du 27 juillet 2005, modifiant et complétant le code des sociétés commerciales a rétabli l’exigence de la nomination d’un commissaire aux comptes par ordonnance sur requête.
[10] La publication d’une notice pour une société ne faisant pas appel public à l’épargne est une pure aberration. Car la publicité est ici sans objet. L’information n’est destinée à personne. Les actionnaires ont déjà signé les statuts et ont pu s’informer sur leurs droits par cette même signature.
[11] Les fondateurs ne soumettent pas aux actionnaires «la déclaration de souscription et de versement », mais, plutôt, « une déclaration sur le versement de la part exigible
[12] Le changement est la conséquence de cette réforme qui exige que tous actionnaires interviennent dans l’acte constitutif de la société anonyme ne faisant pas appel public à l’épargne.
[13] Tout au plus, il est fait renvoi aux dispositions régissant les formalités de publicité qui précédent la souscription au capital [dépôt au greffe (art. 293 al. 2 C.S.C.), notice et prospectus (art. 302 C.S.C.), avis d’ouverture de la souscription (301 C.S.C] et signature d’un bulletin de souscription (art. 303 C.S.C.).
[14]  يحصل إثبات الإكتتاب وعمليات التحرير...
[15] Selon l’article 170 C.S.C., le dépositaire des fonds établit un certificat constatant les versements.
[16] La récente intervention de la loi 2005-65 du 27 juillet 2005, modifiant et complétant le code des sociétés commerciales, confirme cette confiance lorsqu’elle dispense, aux fins de la déclaration de souscription et de versement lors de la constitution de la société anonyme faisant appel public à l’épargne, la représentation des bulletins de souscription reçus par les intermédiaires en bourse ou les banques.
[17] Le droit français a évolué en substituant le certificat du dépositaire des fonds à la déclaration notariée. Article L225-6 du code de commerce pour la société anonyme faisant appel public à l’épargne ; article L225-13 pour la
société anonyme ne faisant pas appel public à l’épargne et article L225-146 pour l’augmentation de capital.
[18] Art. 106 C.C.
[19] Par exemple, dans notre cas, personne ne soutiendra que la souscription au capital d’une société à responsabilité limitée soit soumise à la déclaration de souscription et de versement. Le code des sociétés commerciales ne l’ayant pas expressément requis, la formalité n’est pas de droit.
[20] Solange Becqué-Ickowicz, Le parallélisme des formes en droit privé, Ed. Panthéon — Assas 2004, p. 313.
[21] Le caractère artificiel de la démonstration n’échappe à personne, car comment accepter que le législateur énumère les articles 167, 169 et 178 et ne mentionne pas les articles 170 et 176 C.S.C. Comment peut-on dire que ces deux articles sont compris dans l’expression « suivants » utilisée par l’article 179 ?
[22] La nature contractuelle de la souscription est discutée en doctrine. Certains se demandent s’il ne s’agit pas
d’une déclaration unilatérale de volonté ou d’un contrat collectif. Fait remarquable, le législateur tunisien a évité de prendre parti sur la question de la nature de la souscription dans l’article 167 C.S.C. lors de la constitution de la société. On remarquera, enfin, que la même rédaction est employée en droit français dans la loi de 1966. Cf. J. Hamel, G. Lagarde, A. Jauffret, op. cit., p. 311.
[23] Dans une communication intitulée «la constitution de la société anonyme ne faisant pas appel public à l’épargne, in colloque sur les nouveautés en matière des sociétés commerciales après les lois de 2005, organisé par le Centre des études juridiques et judiciaires le 3 et 4 février 2006, Pr. Béchir Bel Hadj Yahia avait regretté que certains articles du code des sociétés commerciales (il cite comme exemple l’article 181 C.S.C) soient trop longs. Cette longueur, confirmée dans l’article 179 C.S.C, ne facilite pas la technique législative de renvoi d’un texte à un autre. Dans notre cas, l’article 179 C.S.C. traite des causes de nullité de la société anonyme (al. 1) ou des actes et délibérations postérieurs (al. 4), de l’effet de la nullité à l’égard des tiers (al. 2), de la possibilité de régularisation (al. 3, 4 et 5), du délai de prescription (al. 7). Les limites du renvoi fait par l’article 303 C.S.C. à l’article 179 C.S.C doivent être fixées en fonction du contexte d’énonciation. En l’espèce, le législateur a voulu fixer le régime de l’action en nullité d’une souscription (plus exactement d’un contrat de souscription) consentie dans un bulletin de souscription ne répondant pas aux exigences de forme ou consentie par incapable ou par une personne victime d’un vice de consentement.

1 commentaire:

  1. Un article qui m'aide beaucoup lors de mon élaboration de mémoire ,c'est très riche en information, je ne peux qu'être reconnaissante à ce travail méthodique .
    Bonne continuation

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