Les décomptes provisoires et le décompte
définitif dans les marchés publics de travaux
II) Le décompte définitif
Contrairement
aux décomptes provisoires, le décompte définitif a vocation à régler des
situations qui n’évoluent plus et qui, sauf exception, engage irrévocablement
les parties contractantes. Le solde d’un marché de travaux est arrêté à l’issue
d’une procédure comportant plusieurs étapes (A). Des incidents peuvent
se produire (B).
A) Processus d’établissement du décompte définitif
a) Projet de décompte définitif
L’entrepreneur
dresse le projet de décompte définitif. Ce projet est accepté ou rectifié par
le maitre d’œuvre. Le projet établi par le maitre d’œuvre et accepté par le
chef du projet devient le décompte définitif.
Délai
de production du projet de décompte définitif.
L’entrepreneur
est tenu de transmettre son projet de décompte définitif au maître d’œuvre dans
un délai de 45 jours à compter de la date de notification de la décision de
réception provisoire des travaux. Un document adressé avant la réception des
travaux ne peut être considéré comme un projet de décompte définitif.
Sanction
en cas de retard dans la production du projet de décompte final.
En
cas de retard dans la présentation du projet de décompte définitif,
l’entrepreneur est passible d’une pénalité. Elle est 1/10.000 du montant du
décompte. Cette pénalité est appliquée après un ordre de service rappelant à
l'entrepreneur ses obligations et est calculées depuis la date limite fixée par
l'ordre de service jusqu'à la remise effective du projet de décompte attendu.
Contenu
et effets du projet de décompte définitif.
Le
projet de décompte définitif établit le montant total des sommes auxquelles il
peut prétendre du fait de l'exécution du marché dans son ensemble, les
évaluations étant faites en tenant compte des prestations réellement exécutées.
Ce
projet de décompte est établi à partir des prix de base comme les projets de
décompte provisoire et comporte les mêmes parties que ceux-ci à l'exception des
approvisionnements et des avances. Il est accompagné des cahiers des quantités
prises en compte, effectués à partir des éléments contenus dans les constats
contradictoires ainsi que le calcul, avec justification à l'appui, des
coefficients de révision de prix si ces éléments et pièces n’ont pas été
précédemment fournis.
L’entrepreneur
est lié par les indications figurant au projet de décompte définitif établi par
lui-même ainsi que sur le montant des intérêts moratoires éventuels. Dans le
projet de décompte définitif l’entrepreneur doit récapituler les réserves qu’il
a émises et qui n’ont pas été levées, sous peine de les voir abandonnées.
Projet
de décompte définitif concurremment ou à la place du projet de décompte
mensuel.
Deux
possibilités s’offrent à l’entrepreneur pour obtenir le règlement des travaux
exécutés au cours du dernier mois du chantier.
Il
peut établir un décompte mensuel afférent aux travaux et cela concurremment
avec la production du décompte final. Le terme concurremment ne signifie pas
simultanément car le décompte mensuel concerne les travaux exécutés en fin
d’achèvement des travaux alors que le décompte final est nécessairement
postérieur à la date de leur réception. Il
peut ne fournir que le décompte final. Cette deuxième modalité peut retarder le
paiement des sommes correspondant aux prestations effectuées au cours du mois
précédant l’achèvement des travaux.
b) Le décompte définitif
Le projet de décompte définitif établi, signé par le
maître d’œuvre et accompagné du projet de décompte définitif établi par
l’entrepreneur, si ce dernier a été modifié, est transmis au chef du projet.
Le projet de décompte définitif établi par le maître
d’œuvre et accepté par le chef de projet devient le décompte définitif. Il
doit être signé d’une autorité qualifiée. Cette autorité est la personne
responsable du marché.
Dans
le cas où le maître de l’ouvrage n’établit pas le décompte définitif, il
appartient à l’entrepreneur, avant de saisir le juge, de mettre celui-ci en
demeure d’y procéder. En revanche, lorsqu’il omet d’y apposer sa signature,
l’entrepreneur peut saisir directement le juge.
Le
décompte définitif, signé par le chef du projet doit être notifié à
l’entrepreneur par ordre de service dans un délai fixé.
L’ordre
de service irrégulier ou la notification irrégulière empêche le décompte
définitif d’acquérir un caractère définitif. Si un décompte définitif
irrégulièrement notifié ne peut donc devenir définitif, il doit néanmoins être
contesté dans des conditions régulières.
Le
retard dans la notification du décompte définitif n’entraine ni la nullité de
ce décompte, ni son acceptation tacite. Elle ouvre cependant, au bénéfice de
l’entrepreneur, droit à intérêts moratoires sur le solde du marché.
Signature
du décompte définitif par le titulaire
A
compter de la notification du décompte définitif, l’entrepreneur dispose d’un
délai de 45 jours pour renvoyer au maître d’œuvre, revêtu de sa signature, sans
ou avec réserves, ou faire connaître les raisons pour lesquelles il refuse de signer.
Si
la signature est donnée sans réserve par le titulaire, il devient le décompte
devient le décompte général et définitif du marché. La
date de sa notification devient le point de départ du délai de paiement.
Dans
le cas où l’entrepreneur n’a pas renvoyé au maître d’œuvre le décompte
définitif signé, dans le délai de 45 jours ou encore dans le cas où ayant
renvoyé dans ce délai, il n’a pas motivé son refus ou n’a pas exposé en détail
les motifs de ses réserves en précisant le montant de ses réclamation, ce
décompte définitif est réputé accepté par lui.
B) Incidents dans l’établissement du décompte définitif
Ils
tiennent à des faits du titulaire ou à des faits de l’administration
contractante.
a) Opposition de l’entrepreneur
L’entrepreneur
peut refuser de signer, ce qui signifie un désaccord total, comme il peut
signer avec réserves, ce qui implique un désaccord partiel.
Forme
de l’opposition de l’entrepreneur.
Qu’il
refuse de signer ou qu’il exprime des réserves, l’entrepreneur adresser un
mémoire au maître d’œuvre. Le délai imparti est de 45 jours.
Le
mémoire doit exposer les motifs du refus ou des réserves ; il doit
également préciser le montant des sommes revendiquées. Le mémoire doit être
accompagné des justifications nécessaires. Le mémoire reprend les réclamations
déjà formulées antérieurement et qui n’ont pas fait l’objet d’un règlement
définitif.
Effet
de l’opposition de l’entrepreneur
La
contestation du décompte définitif peut porter sur l’ensemble du compte ou sur
certains éléments.
Si
l’opposition est générale le décompte ne devient pas définitif. Les parties
sont libres de former de nouvelles demandes relatives à l’exécution financière
du contrat.
Si
la contestation est partielle, l’entrepreneur est lié par son acceptation
implicite des éléments du décompte sur lesquels ces réserves ne portent pas.
La
suite réservée aux réclamations
Le
règlement du différend intervient suivant les modalités indiquées à l’article
50 du CCAG. Il est prévu deux procédures selon que le différend est entre
l’entrepreneur et le maître d’œuvre ou entre l’entrepreneur et le chef du
projet.
Différend
entre l’entrepreneur et le maître d’œuvre
Un
différend peut survenir entre le maître d'œuvre et l'entrepreneur, sous la
forme de réserves faites à un ordre de service ou sous toute autre forme. En ce
cas, l'entrepreneur remet au maître d'œuvre, aux fins de transmission au chef
du projet, un mémoire exposant les motifs et indiquant les montants de ses
réclamations. Les réserves de l’entrepreneur sont susceptibles d’être
confirmées lors de l’établissement du décompte définitif.
Une
fois que ce mémoire a été transmis par le maître d'œuvre, avec son avis, au
chef du projet, celui-ci notifie ou fait notifier à l'entrepreneur sa
proposition pour le règlement du différend, dans un délai de quarante cinq
jours à compter de la date de réception par le maître d'œuvre du mémoire de
réclamation.
L'absence
de proposition dans ce délai équivaut à un rejet de la demande de
l'entrepreneur..
Lorsque
l'entrepreneur n'accepte pas la proposition du chef du projet ou le rejet
implicite de sa demande, il doit, sous peine de forclusion, dans un délai de
trois mois à compter de la notification de cette proposition ou de l'expiration
du délai de quarante cinq jours ci-dessus, le faire connaître par écrit au chef
du projet en lui faisant parvenir, le cas échéant, aux fins de transmission
au maître d'ouvrage, un mémoire complémentaire développant les raisons
du refus.
Si dans le délai de trois mois à partir
de la date de réception par le chef du projet de la lettre ou du mémoire de
l'entrepreneur, aucune décision n'a été notifiée à l’entrepreneur, ou si
celui-ci n'accepte pas la décision qui lui a été notifiée, l'entrepreneur peut
saisir les juridictions compétentes. Il ne peut porter devant ces juridictions
que les chefs et motifs de réclamations énoncés dans la lettre ou le mémoire
remis au chef du projet.
Cette saisine pouvait s’effectuer sans condition
de délai lorsque le maître de l’ouvrage n’avait pas pris position. En revanche,
en cas de décision expresse de sa part, l’entrepreneur était, sous peine de
forclusion, tenu de saisir le tribunal dans un délai de six mois suivant la
notification de cette décision.
Différend
opposant l’entrepreneur et le chef du projet
Si
un différend survient directement entre le chef du projet et l'entrepreneur,
celui-ci doit adresser un mémoire de réclamation au chef du projet aux fins de
transmission au maître d'ouvrage.
Si
l'entrepreneur ne donne pas son accord à la décision ainsi prise
par le maître d’ouvrage, les modalités fixées par cette décision sont
appliquées à titre de règlement provisoire du différend,
le règlement définitif relevant des procédures, contentieuses.
Délai
pour agir devant le tribunal administratif
Si,
dans le délai de six mois à partir de la notification à l'entrepreneur de la
décision prise par le maître d’ouvrage sur les réclamations auxquelles a donné
lieu le décompte définitif du marché, l'entrepreneur n'a pas porté ses
réclamations devant les juridictions compétentes, il est considéré comme ayant
accepté ladite décision et toute réclamation est irrecevable.
Toutefois,
le délai de six mois est suspendu en cas de saisine du comité consultatif de règlement
amiable.
b) Difficultés du fait de l’administration contractante
Elles
sont liées à la réception avec réserves, à la résiliation du marché ou à
l’inertie de l’administration contractante d’établir le décompte définitif.
Réception
avec réserves
Compte
tenu du caractère intangible du décompte général et définitif, le maître
d’ouvrage doit s’abstenir de notifier le décompte général à l’entrepreneur.
S’il le fait, il ne serait pas en droit de réclamer au titulaire les sommes
correspondantes à la levée des réserves qu’il serait amené à débourser pour
procéder lui-même à la levée des réserves. Le maître d’ouvrage peut cependant
inscrire une somme provisionnelle au risque que celle-ci apparaisse inférieure
au coût réel des réfactions.
Résiliation
du marché aux torts de l’entrepreneur
L’établissement
du décompte général et définitif est suspendu jusqu’à ce que le décompte
général et définitif du marché de substitution soit établi. Le maître d’ouvrage
peut cependant renoncer à conclure un marché de substitution auquel cas, il y a
lieu d’établir le décompte général et définitif du marché résilié. Le titulaire d’un contrat ayant fait l’objet
d’une résiliation peut saisir le juge du contrat afin de faire constater
l’irrégularité ou le caractère infondé de cette mesure et demander en
conséquence le paiement des sommes qui lui sont dues, sans attendre le
règlement définitif du nouveau marché.
Inertie
de l’administration contractante d’établir le décompte définitif
Le
CCAG ne comporte aucune règle régissant cette situation. Le titulaire du
marché ne pouvait que mettre le maître de l’ouvrage en demeure d’établir le décompte et, en cas
d’insuccès de cette démarche, saisir le juge pour qu’il procède à
l’établissement de celui-ci.
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